J’aimerais vous parler aujourd’hui d’un aspect particulier de l’autisme : la sensorialité. Les personnes qui présentent un TSA (trouble du spectre de l’autisme) reçoivent et traitent différemment les informations sensorielles de leur environnement.
La sensorialité fait même partie intégrante de l’autisme : elle reflète toute la diversité et la créativité des personnes autistes. Mais elle peut également entrainer l’incompréhension de l’entourage, ainsi que des situations de stress intenses en cas de surcharge sensorielle.
Quels sont les systèmes sensoriels ? Comment est-ce que la sensorialité se manifeste chez les personnes autistes ? Comment est-ce que l’on interprète les stimuli ? Quelles sont les conséquences concrètes pour les autistes ? Comment améliorer la vie quotidienne quand on perçoit les stimuli différemment ? Nous allons voir tout cela plus en détail dans cet article.
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Quelques bases pour comprendre la sensorialité chez les autistes
On ne peut pas vivre sans ressentir notre environnement. L’importance de ces expériences est cruciale dans notre développement, notre manière de communiquer, notre panière de voir le monde… que l’on soit autiste ou non.
Les 7 systèmes sensoriels
On a tous apprès à l’école que les êtres humains sont dotés de 5 sens : la vue, l’ouïe, le toucher, le goût et l’odorat. Mais il existe deux autres systèmes sensoriels à prendre en compte quand on parle de sensorialité.
Le système vestibulaire : il s’agit de l’équilibre, de la gestion des mouvements du corps, la vitesse et la perception de la gravité.
Le système proprioceptif : il s’agit des muscles, des nerfs et des articulations. Ils délivrent des informations sur les stimuli extérieurs à l’organisme, la position du corps dans l’espace, etc.
C’est au moment de l’interprétation des stimuli qu’intervient la différence entre les systèmes sensoriels des personnes avec et sans autisme.
Le traitement des informations sensorielles peut être plus ou moins perturbé chez les personnes avec TSA, ce qui peut avoir un impact sur leur qualité de vie (on en reparle un peu plus loin dans cet article). En tout cas, les particularités sensorielles sont plus importantes chez les autistes que dans la population générale.
Comment est-ce que les autistes interprètent les stimuli sensoriels ?
Pour faire simple : les organes des sens transforment les sons, les odeurs, la lumière, etc. en signaux nerveux que le cerveau doit interpréter. La perception sensorielle, c’est l’ensemble des connaissances que chaque être humain a collectées via l’expérience de ses sens.
Le processus comprend 4 étapes :
- La perception d’un stimulus (je vois un cookie)
- La sensation (c’est un objet petit, rond et brun)
- L’interprétation (c’est un gâteau)
- La compréhension (on peut le manger)
Les personnes autistes vivent les mêmes expériences que les personnes non autistes, mais le traitement de l’information est différent (selon la conférencière et chercheuse Olga Bogdashina).
Par exemple, une personne avec autisme ne parvient généralement pas à hiérarchiser les informations sensorielles et ne sait pas déterminer si elles sont pertinentes ou non. Elles n’ont pas de filtre (ou un filtre défectueux). Un bruit de fond à peine audible, comme une conversation lointaine ou une ventilation dans un magasin, peut être perçu avec la même intensité que le son de la voix de la personne en face, avec laquelle ils discutent.
Sensorialité différente, TSA et vie quotidienne
On a vu que le cerveau des personnes avec autisme et celui des personnes sans autisme traitaient les informations sensorielles de manière différente. Il y a un autre paramètre à prendre en compte, et pas des moindres…
Hypo ou hypersensible ?
Le traitement de l’information dépend aussi de la sensibilité de la personne. Si tout le monde peut présenter des hypo- ou des hypersensibilités, ces deux caractéristiques sont très présentes chez les personnes avec TSA.
Dans le cas de l’hypersensibilité, trop d’informations arrivent au cerveau, qui ne parvient pas à tout traiter. On parle par exemple d’hypersensibilité tactile quand on ne supporte pas le contact des étiquettes des vêtements ou la texture de certains aliments.
À l’inverse, dans le cas de l’hyposensibilité, le cerveau se trouve privé d’information car les canaux sensoriels ne sont pas assez ouverts. On parle par exemple d’hyposensibilité visuelle quand on recherche les sources de lumières fortes et les reflets brillants.
Les avantages et les inconvénients d’une perception sensorielle particulière
On ne va pas se mentir, les inconvénients sont plus nombreux que les avantages !
Les personnes avec autisme sont réputées pour faire très attention aux détails et à la précision des informations. C’est l’un des avantages de l’absence de filtres pour hiérarchiser les stimuli de premier plan et les stimuli d’arrière-plan.
En revanche, le cerveau entre rapidement en surchauffe, car il ne peut pas analyser toutes les informations à la fois. On parle alors de surcharges sensorielles, qui peuvent être très envahissantes et impacter la qualité de vie des personnes avec autisme.
Parce que leur perception sensorielle est différente et que le flot d’informations est parfois difficile à traiter, les personnes avec autisme se sentent particulièrement vulnérables, gênées ou confuses, voire profondément angoissées.
Concilier sensorialité différente et qualité de vie
Voici 3 conseils pour améliorer votre qualité de vie, si vous êtes une personne avec autisme, ou pour soutenir un proche qui présente un TSA.
💡 Conseil n°1 : être ouvert d’esprit
Cela peut paraître basique, mais ce rappel me tient à cœur : tous les proches des personnes autistes devraient connaître au maximum leurs particularités sensorielles, afin de mieux les comprendre (ou, au moins, de ne pas les juger). L’ouverture d’esprit est le tout premier pas, et il représente déjà beaucoup !
“Ce ne sont pas des caprices qu’il serait plus convenable socialement d’éteindre ou de masquer. Ce ne sont pas des caprices, mais des manifestations fonctionnelles d’une hyper ou d’une hypo réactivité cognitive aux stimuli.”
Extrait du podcast TroubleS dans le Spectre
💡 Conseil n°2 : aménager son environnement
Vivre dans un environnement sensoriel adapté est une condition indispensable pour le bien-être des personnes avec autisme. Cela peut garantir une bonne hygiène de vie mentale et un confort psychique indispensable à leur bien-être.
Plus facile à dire qu’à faire ? Certes, mais il suffit parfois de quelques aménagements simples, comme autoriser une personne autiste à porter un casque anti-bruit dans un open-space, ou diminuer l’intensité de la lumière dans un espace collectif.
💡 Conseil n°3 : prendre soin de soi
La principale conséquence de la surcharge sensorielle est la fatigue. Si c’est votre cas, prenez des pauses, soyez moins exigent avec vous-même, respectez vos propres particularités, soyez bienveillant envers vous-même. Les techniques de relaxation proposées en sophrologie peuvent vous apporter le bien-être et le calme dont vous avez besoin.
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